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Habilitation à diriger les recherches : soutenance de Régis Lobjois mardi 26 septembre

Régis Lobjois a brillamment soutenu son habilitation à diriger les recherches (HDR) le mardi 26 septembre sur le campus de Marne la Vallée

 

Soutenance d'habilitation à diriger les recherches

Evaluation des simulateurs de conduite : De la validité comportementale à la validité psychologique

Régis Lobjois, Chargé de Recherche Classe Normale du Développement Durable
Laboratoire Perceptions, Interactions, Comportements et Simulations des usagers de la route
Département COSYS, Université Gustave Eiffel

Mardi 26 Septembre 2023
14h, salle A016, Bâtiment Bienvenue
14-20 Boulevard Newton
Cité Descartes, Champs sur Marne

Devant le jury composé de :
- Jean-Marie BURKHARDT (DR, Université Gustave Eiffel), Rapporteur
- Anatole LECUYER (DR, INRIA), Examinateur
- Franck MARS (DR, CNRS), Examinateur
- Daniel MESTRE (DR, CNRS), Rapporteur
- Jean-Marie NORMAND (PU, Ecole Centrale Nantes), Examinateur
- Anne-Hélène OLIVIER (MCF, HDR, Université Rennes 2), Examinatrice
- Alexis PALJIC (CR, HDR, Ecole des Mines Paris), Rapporteur

Ces travaux ont été effectués au sein de l’Equipe Modélisation, Simulations et Simulateurs de l’Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité (INRETS) puis au sein du Laboratoire Perceptions, Interactions, Comportements et Simulations des usagers de la route de l’Institut Français des Sciences et Technologies des Transports, de l’Aménagement et des Réseaux (IFSTTAR), intégré aujourd’hui à l’Université Gustave Eiffel. Au sein de ces laboratoires, une équipe pluridisciplinaire est en charge de concevoir, développer et évaluer les dispositifs de simulation de conduite ou de réalité virtuelle permettant de mener des recherches visant à mieux comprendre les comportements des usagers de la route. C’est dans ce contexte que les travaux consignés dans le manuscrit ont été réalisés, leur objectif étant de déterminer en quoi et pourquoi les comportements observés sur simulateur se distinguent de ceux observés en situation réelle et d’identifier les leviers permettant de réduire les écarts existant entre réel et virtuel.

Bien que les technologies de réalité virtuelle aient connu d’importants développements ces dernières années, elles font encore face à certaines limites, en particulier relatives aux incohérences sensorielles et sensori-motrices, les plus connues étant, et pour ne citer que celles-ci, le conflit accommodation-vergence et le conflit visuo-vestibulaire. Ces incohérences sont susceptibles d’induire des effets négatifs sur l’expérience vécue de l’utilisateur en réalité virtuelle, mais aussi des effets délétères sur sa performance et sa santé, avec la survenue souvent constatée de cybercinétose (ou mal du simulateur). Si le mal du simulateur est la conséquence la plus manifeste des effets indésirables d’une exposition à la réalité virtuelle, et reste un des freins les plus importants à leur développement, la question de la validité de ces outils pour l’étude du comportement humain est également très vive dans la plupart des domaines d’application. D’une part, leurs effets sur les processus perceptivo-moteurs et cognitifs sont encore mal connus et circonscrits. D’autre part, force est de constater qu’il n’existe pas de modèle d’évaluation des dispositifs de réalité virtuelle qui fasse autorité.

Que les dispositifs aient vocation à divertir, éduquer, entraîner, évaluer ou réhabiliter, leur essor rend crucial l’examen des effets, positifs comme limitants, de l’exposition à la réalité virtuelle sur les utilisateurs. Quelles sont les caractéristiques immersives et/ou interactives qui facilitent et entravent l’adoption de comportements naturels ? Quel(s) critère(s) évaluer pour rendre compte de la validité d’un dispositif eu égard aux objectifs qui lui sont assignés ? Existe-t-il une ou au contraire de multiples validités des dispositifs de réalité virtuelle ? Dans ce champ de recherche, co-existent plusieurs dimensions permettant de rendre compte de la fidélité et de la validité des dispositifs de réalité virtuelle : la fidélité physique, qui renvoie au degré de correspondance entre réel et virtuel au plan des stimulations sensorielles, la validité subjective, qui renvoie à la crédibilité accordée à l’expérience vécue en réalité virtuelle (réalisme, sentiment de présence), la validité comportementale qui adresse la correspondance en termes de performance entre les deux environnements, et enfin la validité psychologique, qui renvoie à la correspondance au plan des processus et ressources mis en jeu. Deux hypothèses sont également mises en avant dans les démarches d’évaluation des dispositifs: i) plus le système sera fidèle, plus la crédibilité subjective accordée à l’expérience vécue sera élevée, et plus les performances seront similaires entre réel et virtuel, et ii) plus le système sera fidèle, plus les exigences perceptivo-motrices et cognitives de la tâche seront reproduites en virtuel et plus les performances en virtuel seront proches de leur équivalent réel. Néanmoins, un haut niveau de validité subjective ne garantit pas un haut niveau de validité comportementale. Un utilisateur peut tout à fait porter un jugement positif à l’égard d’un dispositif sans pour autant avoir des performances en virtuel qui égalent celles en réel. D’autre part, un haut niveau de validité comportementale ne garantit pas un haut niveau de validité psychologique. Un utilisateur peut en effet se comporter de la même façon en réel et en virtuel sans pour autant que les processus et ressources soient mobilisés de la même façon dans les deux environnements.

Les travaux de recherche rapportés dans cette HDR avaient pour objectif de fournir des éléments de réponse à ces problématiques de l’évaluation de la validité des simulateurs de conduite en confrontant des mesures de la validité comportementale et des mesures de la validité psychologique.

Dans la première partie de contribution expérimentale, qui a porté sur le développement et l’évaluation d’un simulateur de conduite moto à plateforme dynamique, nous nous sommes intéressés aux effets de certains facteurs de la fidélité physique (introduction d’une inclinaison en roulis de la scène visuelle comme métaphore de l’inclinaison lors de la conduite moto, inclinaison en roulis de la moto, mode de contrôle de la trajectoire) sur les utilisateurs. Les performances de conduite ayant été analysées sous l’angle du contrôle latéral de la trajectoire et de sa stabilité, nous avons examiné les stratégies visuelles qui sous-tendent le contrôle du véhicule (mesure de la validité psychologique) afin de déterminer si elles corroborent les mesures de la validité comportementale.

La seconde partie de contribution expérimentale s’est centrée sur l’étude des relations entre contrôle du véhicule et ressources attentionnelles, au travers d’une étude de comparaison entre conduite sur route et conduite sur simulateur, avec l’objectif principal de déterminer, d’une part, si les comportements de conduite sont affectés par la conduite sur simulateur et, d’autre part, d’examiner si les ressources mobilisées (mesure de la validité psychologique) corroborent les effets observés sur la validité comportementale. Les résultats obtenus nous ont amenés à questionner i) l’existence d’une automatisation des processus qui relèvent du niveau opérationnel sous l’effet de la répétition, et ii) le rôle des différences individuelles au plan des capacités de ressources attentionnelles dans l’adaptation à un simulateur de conduite.

Dans la troisième et dernière partie de contribution, l’objectif était de montrer en quoi les activités de recherche sur la validité des simulateurs de conduite servent des problématiques scientifiques plus appliquées, en l’occurrence l’effet d’un aménagement routier sur les comportements de conduite. Après avoir mis en évidence le rôle prépondérant de la cabine de véhicule (demie-cabine, présence ou non d’une cabine virtuelle) sur le positionnement latéral, cette troisième partie a été l’occasion de réinvestir la relation entre contrôle latéral du véhicule et contrôle visuel pour comprendre les effets d’un aménagement au plan des comportements de conduite mais aussi au plan des processus qui les sous-tendent.

Dans la dernière partie du document, une synthèse et des perspectives de recherche à long terme sont esquissées, après que des perspectives à plus court terme aient été présentées comme prolongement de chacune des contributions expérimentales.

Les travaux rapportés dans cette HDR s’appuient sur les résultats de deux thèses sur des financements INRETS puis IFSTTAR, quatre projets de recherche dont deux en tant que porteur, sept post-doctorats en Sciences Humaines (6) et Sciences pour l’Ingénieur (1) et plusieurs stages de fin d’études (Master 2 et Ingénieur). Ces travaux ont donné lieu à une quinzaine de publications dans des revues internationales.